Apporter des précisions relatives à la durée de congélation domestique, permettant d’assurer la destruction des larves d’Anisakidae présentes dans les poissons
Contexte
La présence de nématodes parasites dans les produits de la pêche concerne tous les acteurs de la filière aquatique. Ces parasites peuvent être à l’origine d’une part d’un risque sanitaire avec développement de pathologies digestives ou allergiques et d’autre part d’un risque médiatique et économique.
La France recense une dizaine de cas d’anisakidoses par an. Ces cas sont le résultat d’un ou plusieurs facteurs concomitants :
- La présence de ces parasites, parfois non visibles à l’oeil nu,
- Un non-respect de la réglementation par les professionnels,
- De mauvaises pratiques des consommateurs (manque d’informations sur la nécessité de congeler le poisson de pêche préalablement à une consommation à l’état cru et nouvelles pratiques culinaires)
Une étude publiée dans le bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) avait mis en évidence 43 cas d’hospitalisations entre 2010 et 2014 (aucun décès). Quatre cas simultanés ont été recensés en Bretagne en août 2018 liés à la consommation de merlu cru et / ou d’anchois marinés parasités. De plus, ce nombre de cas est considéré comme étant sous- estimé puisque la déclaration n’est pas obligatoire, le diagnostic n’est pas systématiquement confirmé et les symptômes peuvent disparaitre spontanément suite à l’élimination du parasite. Les symptômes apparaissent lors de la pénétration par les larves d’Anisakidae dans la muqueuse gastrique et/ou intestinale. Ces derniers sont donc principalement des symptômes gastriques et/ou intestinaux (douleurs abdominales, nausées, vomissements, diarrhées, syndromes appendiculaires …). Chez les personnes sensibles, l’ingestion répétée de larves d’Anisakidae, peut engendrer une allergie pouvant aller jusqu’au choc anaphylactique.
Le règlement (CE) n° 853/2004 (annexe III, section VIII, chapitre III, point D) prévoit que les produits de la pêche présentant un risque du fait de leur mode de consommation ou de préparation soient soumis à un traitement par congélation à coeur, pendant 24h à -20°C ou 15h à -35°C, pour garantir la mort des parasites. Dans son avis de 2010, l’EFSA concluait qu’un traitement de 96h à -15°C (température à coeur du produit) garantit un même niveau de protection. Cette « congélation assainissante » est obligatoire et concerne tout professionnel qui met sur le marché des produits de la pêche dont le mode de préparation ou de consommation représente un risque (ex : produits crus, produits fumés à froid, produits légèrement marinés…). Elle peut être effectuée à toute étape de la transformation du produit (de la pêche à la distribution).
En congélateur ménager, une durée de stockage de 7 jours est actuellement recommandée (temps total de congélation et de stockage). Cette recommandation provient d’un avis de l’Anses disponible en ligne (fiche de danger transmissible par les aliments sur Anisakis et Pseudoterranova). Cette durée de stockage a été déduite de données acquises pour les congélations assainissantes par les professionnels et a été étendue aux consommateurs. Elle correspond également aux exigences de la règlementation nord-américaine et aux recommandations pour les consommateurs du CDC (CDC – Anisakiasis – Frequently Asked Questions (FAQs)).
Cependant, l’efficacité des pratiques de congélation du consommateur, pour détruire les parasites, n’a jamais été étudiée. Parfois considérée comme longue, cette durée de congélation méritait d’être précisée. D’autant que la DGAl, dans son Instruction Technique DGAL / SDSSA / 2019-220, disponible en ligne, avait récemment souligné les obligations attendues par les professionnels de chaque maillon de la filière, les poissonniers et rayons marée des distributeurs étant tenus d’informer les clients de la nécessité d’une congélation préalable du poisson avant préparation et consommation cru ou peu transformé.
Objectifs
L’étude proposée avait pour objectif d’apporter des précisions relatives à la durée de congélation domestique, permettant d’assurer la destruction des larves d’Anisakidae présentes dans les poissons.
- Déterminer le temps nécessaire pour atteindre la température recommandée de -18°C à cœur des produits selon différents scenarii potentiellement retrouvés chez le consommateur : type d’équipement (freezer ou congélateur), espèce de poisson, épaisseur du produit et taux de remplissage du freezer / congélateur
- Evaluer l’efficacité du barème de congélation domestique recommandé (7 jours) sur la destruction des nématodes parasites couramment présents dans le poisson commercialisé sur le marché français, et caractériser un barème minimal efficace.
Méthodologie
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Mise au point de protocoles
1.1. Cartographie thermique des produits à cœur selon différents scenarii :
- Type d’équipement : freezer – 6°C 1 étoile, freezer -12°C 2 étoiles, congélateur 3* de stockage (-18°C), congélateur 4* de congélation (-18°C)
- Nature de l’espèce de poisson (maigre type merlu et poisson pélagique gras type maquereau pour Anisakis + lotte pour Pseudoterranova)
- Epaisseur du produit : filet de poisson, poisson entier
- Taux de remplissage du congélateur (vide vs plein)
La cinétique est réalisée sur un minimum de 7 jours mais pourra être prolongée selon les températures atteintes.
1.2. Etude de la viabilité des parasites : différents protocoles seront définis et standardisés :
- Mouvement spontané ou après stimulation
- Survie en suc gastrique artificiel : suivi de la viabilité des larves sur plusieurs jours à 37°C dans un milieu acide et contenant de la pepsine et de la mucine
- Capacité de pénétration dans l’agar recouvert de suc gastrique artificiel après 24h à 37°C
- Observation microscopique de la cuticule des larves sous apotome, avec ou sans coloration
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Efficacité de la congélation domestique sur des larves d’Anisakidae naturellement présentes.
La viabilité des parasites sera évaluée par les protocoles mis au point au 1.
2.1. Efficacité de la durée de 7 jours dans des conditions favorables ou non, telles que définies au 1. Quatre conditions favorables et 4 non-favorables seront sélectionnées suite à la cartographie thermique et seront testées sur les 3 espèces de poissons et 2 genres de parasites.
2.2. Détermination du temps minimal requis pour détruire efficacement les parasites. Suite aux résultats obtenus au 2.1, les conditions les plus favorables pour chaque espèce de poisson (poisson entier) et de parasite seront retenues pour réaliser une cinétique (suivi sur 7 jours de l’efficacité de la congélation avec prélèvements réguliers.
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Etablissement du rapport final
- Un rapport final intégrant l’ensemble des résultats sera établi.
- Une fiche de synthèse sera réalisée à l’intention des opérateurs de la filière, prenant en compte les temps minimaux requis pour détruire efficacement les parasites. Ce document pourra être utilisé ultérieurement par l’évaluateur du risque et pourra servir de base à des recommandations pour les consommateurs.
Résultats
Tous les essais réalisés en congélateurs 3 et 4* ont mis en évidence une destruction des parasites au bout de 24h de congélation / stockage (sur la base de 14 essais différents réalisés, pour un total d’environ 1400 parasites analysés), alors que les parasites étaient encore vivants dans les échantillons témoins. Les résultats peuvent donc être considérés comme statistiquement fiables.
Bien qu’aucune identification moléculaire et morphologique n’ait été réalisée pour identifier la nature des parasites, l’analyse visuelle nous laisse penser que seules des larves d’Anisakis ont été analysées pour l’ensemble de ces essais. De plus, il est rare de retrouver des Pseudoterranova dans les merlus et harengs. Ces résultats rejoignent ceux de PODOLSKA et al (2019) qui ont aussi mis en évidence la mort des parasites à des températures inférieures -15°C. En congélateur ménager, une durée de stockage de 7 jours est actuellement recommandée (temps total de congélation et de stockage). Cette recommandation provient d’un avis de l’Anses. Cette durée de stockage a été déduite de données acquises pour les congélations assainissantes par les professionnels et de la règlementation nord-américaine et a été étendue aux consommateurs.
Conclusion
Sur la base de l’ensemble des résultats obtenus dans le cadre de ce projet, il semblerait que cette recommandation de stockage de 7 jours en congélateur ménager, souvent considérée comme longue, puisse être réduite. Par contre, l’entreposage en freezer 1 ou 2* doit être proscrit parce que des parasites vivants peuvent encore être retrouvés, même au bout de 7 jours de stockage.
Thématique du projet
Structuration de filière
Statut du projet
Terminé : 01/09/2019 - --/--/--
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